26 juillet 2013

Ich liebe dich quand même!

Comme promis, je reprends les choses là où je les avais laissées en plan, à la fin d’un billet précédent. Le dernier paragraphe disait: « Mon prochain billet sur la relation franco-allemande sera plus léger, il parlera d’une histoire de poubelles allemandes mais débutera par une phrase féerique. » 

Il était une fois en  Allemagne et en France, une Saucisse et un Flamby.

Qu’ils soient dans les hémicycles politiques ou derrière une bière, les coudes plantés sur le zinc, les Français et les Allemands s’adonnent au vilain plaisir de se critiquer mutuellement. Cette habitude, durement pratiquée dans des temps passés, perdure encore aujourd’hui avec plus de légèreté. C’est donc sans trop écouter l’autre, sa petite phrase bricolée sous le bras et son cliché bien ancré entre les dents que franchouillards et teutons s’encanaillaient à coup de : À qui la faute ? Qui doit changer ? À qui ressembler ?  Vous êtes trop inconscients et irresponsables ! Vous, vous êtes trop austères et graves ! À qui appartient Franck Ribéry ? Et qu’en est-il alors de nos deux dirigeants?

Je poursuis donc ici même ma déraisonnable subjectivo-subjective analyse de cette chose susceptible que l’on caresse « européennement » avec des gants de crins des deux côtés du Rhin, soit la relation franco-allemande.  

Paris, en juin dernier : Remake des parapluies de Cherbourg

Angela court vers François chabadabada, il pleut mais sans hésiter François court vers Angela chabadabada … Pour une fois, l’un avance et que l’autre ne recule pas… au contraire. C’est parapluie sous parapluie (règne de Hollande oblige) que François conduit Angela au Musée du Louvre visiter l’exposition consacrée à la peinture allemande de l’avant-Seconde Guerre mondiale. Ach jajajajajaja !

Merkel-Hollande
Rémy Molinari, caricaturiste et dessinateur de L’Intrus

Terminé le rififi. Concrètement ou presque, depuis plus de deux mois maintenant, la Chancelière allemande et le Président français font mine de raviver la flamme de leur Love Story sulfureuse en rabibochant les vases brisés. Oh Ja ! Au programme : des accords unanimes dans l’Eurogroupe, une contribution commune pour un pacte de croissance et salaire minimum européen avec en ligne de mire l’emploi des jeunes, sujet phare du sommet européen organisé début juillet à Berlin. Bref, un petit pas pour l’Union Européenne mais un grand pas pour la relation franco-allemande.

[…] « Il pleut tout le temps, mais vous allez voir ça va se lever. » F. Hollande

Il y a du mieux entre François et Angela, mais ce n’est pas parce que deux enfants se serrent la main après s’être roués de coups dans la cour de récréation, que la confiance ne se regagne pas petit à petit, à coup de mitraillage de boulettes de papier.

Le sourire  d’Angela vers François est jaune, mais le tailleur Est-allemand de Frau Merkel n’a pas tremblé  d’un pli. A Leipzig, le 23 mai dernier, où il était venu assister à la cérémonie du 150 e anniversaire du parti social-démocrate (SPD), le président Hollande saluait vivement les réformes lancées en 2003 par l’ancien chancelier, Gerhard Schroeder, pour assouplir le marché du travail allemand. Hommage relevé donc à un chancelier SPD (Parti Social-Démocrate) devant une chancelière CDU (Union Chrétienne Démocrate), le tout à deux mois des prochaines élections législatives allemandes, qui opposeront justement la chancelière CDU à Peer Steinbrück du parti SPD, Oups ! Une semaine après, à Paris, la riposte d’Angela fut subtile quand lors d’une conférence de presse commune la chancelière allemande confondait, dans un lapsus (ou pas), François Hollande et François Mitterrand, Aïe! 1 partout égalité ! Balle au centre !

L’amour sera toujours l’amour, ça commence comme un conte de fées et ça s’achève en réglant ses comptes !  La chancelière et le président ont vidé leurs bouches de leurs mots et leurs pensées de leurs maux : Après la pluie le beau temps ! Ah Ja ! Mais pour combien de temps ?

Si j’ai bien compris le schmilblick franco-allemand, avant de se réconcilier, il faut vider son sac, ce qui tombe bien, le mien est plein !  

Cher François, Monsieur le Président Waterproof, ce qui suit est ma pierre à l’édifice pour une bonne harmonisation franco-allemande. Vos accords européens, politiques, financiers et sociaux avec l’Allemagne sont enfin de bon ton mais réfléchissez tout de même à deux fois avant de dire Ja ja à tout, par pitié dites NEIN aux éléments futiles inscrits sur cette  liste, que j’ai rédigée en totale absurdité pour vous.  

Salutations distinguées d’une française à Berlin.

PS : Monsieur le Président, veuillez considérer MEINE GROSSE DOSE d’ironie !

Je donne ici même en pâture quelques petites mignardises allemandes que je rumine avant d’en sourire ; que mes amis allemands me pardonnent et restent encore mes amis. Danke ! Heureusement aucun ne parle français !

NEIN aux poubelles allemandes! Ma grand-mère maternelle, âgée aujourd’hui de 91 ans, me demande toujours quand je lui rends visite : _« Aurore, c’est toujours  très propre en Allemagne ? »

Poubelles Berlin ©A.G

Tout comme moi, elle a vécu en Allemagne, contrairement à moi elle a été contrainte d’y survivre, (mais ça c’est l’histoire d’un prochain billet). A chaque fois que j’entends cette constatation de mon aïeule, j’ai comme qui dirait des centaines de poubelles de couleurs, de tailles et de fonctionnalités définies dans une praticité sans nom, qui me submergent l’esprit.

la poubelle allemande, un objet de décoration à ne jamais se procurer!
Nouvelle décoration de cuisine: Les poubelles ©A?G

Poubelle, poubelle dis-moi qui est la plus belle ! J’ai souvent entendu dire qu’on apprend beaucoup sur les gens quand on fouille dans leurs poubelles. De toute évidence, en Allemagne, on connait les gens à la façon minutieuse dont ils trient leurs déchets. Mes amis allemands ironisent en me disant que c’est un sport national, pour moi depuis 4 ans, c’est mon casse-tête chinois allemand.

Qui va dans quoi ?  Où va qui ? Ma respiration s’accélère. Mon front sue à grosses gouttes.  Mes mains moites glissent sur le sac plastique. Aujourd’hui, je descends les poubelles !

Face à moi le néant :

Si comme moi vus jeter jamais des canard et des arrosoirs, cette poubelle n'est pas pour vous!
Si comme moi vous ne jetez jamais des canards et des arrosoirs, cette poubelle n’est pas pour vous! ©A.G

– les poubelles bleues : pour le papier, le carton
– les poubelles marron : pour les produits bio, déchets alimentaires qui feront du compost
– les poubelles noires ou grises : pour les déchets non recyclables
– les poubelles jaunes : pour les plastiques avec le logo recyclable « point vert »               – la poubelle à verres  verts, la poubelle à verres blancs et celle à verres marron

Attention, après le tri, il faut aussi respecter les temps de repos. Il est interdit de déposer nos bouteilles dans les conteneurs le dimanche ou pendant les heures de repos, en cause la nuisance sonore. Oui ! Monsieur le président, au pays d’Angela, il semblerait que les gens se reposent tous en même temps !

Bref, vous comprendrez ma perdition, moi qui fus élevée dans une famille française où la charte était : une poubelle pour tout !

Travaux pratiques : je dois mettre à la poubelle un bocal de petits pois. Dans quelle poubelle vais-je jeter, ce bocal en Allemagne? Dans la poubelle à verre blanc. FAUX !!!

La réponse était : Mettre le reste de petit pois collés au fond du bocal dans la poubelle à compost. Nettoyer le bocal à l’eau. Déposer le couvercle en métal dans la poubelle noire, arracher l’étiquette en papier pour la jeter dans la poubelle à papier bleu et vérifier la couleur du verre, (Blanc) et ce afin de le jeter dans la poubelle pour les verres de couleur blanche.

« Madame de la 3 étage,  Non plastico dans le poubelle ! Merci ! » : La magie de Google traduction a opéré.

Je n’ai jamais réussi à connaitre ce mystérieux voisin, qui me laissait  avec entêtement et intérêt des Post-it. Qui est-il celui qui passait derrière moi rectifier avec une bienveillance écolo-germano-agacé mes erreurs de française? Depuis j’ai quitté cet appartement. Le dernier jour, j’ai laissé à mon tour, en allemand, un Post-it pour celui qui me connaissait par le truchement puant de mes poubelles : « Monsieur le Voisin! Je pars pour toujours. Les poubelles, l’Ecologie, la Planète et moi-même vous remercient. » C’est aussi ça, l’amour franco-allemand (Clin d’œil à mon collègue Mondoblogueur sénégalais Amet DIA qui connait un problème de poubelle d’un autre genre, à lire)

Nein au flirt allemand. Je suis une romantique qui ne croit ni à la fidélité ni au mariage, mais qui croit au regard timide d’un Charmant  qui m’offrirait de déguster une glace  vanille-fraise sur un banc public. Malheureusement « romantique » et « offrir »  n’est pas  allemand !

Nein aux Abend Brot  (Pain du soir) soit le tapas espagnol sans le gout ni l’exotisme ! Un pain noir tranché que l’on mange avec de la charcuterie douteuse entre 18h et 20h.

Nein aux végétariens et vegans, la tendance berlinoise à l’état pure. Véridiquement insupportable de lire dans les annonces pour une colocation en appartement: «Uniquement maquillage biologique dans la salle de bain, merci ! » Quoi ?  « Nous ne voulons pas de viande dans le frigo, est-ce un problème pour toi ? »   Ah ça tombe très mal car ma viande vit très mal la proximité des carottes et  des tomates,  ça te pose Ein großes Problem?

Nein au vélo à toutes heures, et à toutes saisons. Le maudit deux roues m’a valu un accident de la route avec beaucoup de fractures et une année de rééducation.  Depuis, je suis atteinte de bitrochosophobie (la peur du vélo) dans une ville où le vélo est le meilleur ami de l’homme. Scheisse !

Nein à la saucisse ou aux cornichons en bocaux que tu peux croquer en en-cas à tout moment du jour et de la nuit.

6 saucisses Deutschländer dans bocal en verre de 330g
6 saucisses Deutschländer dans bocal en verre de 330g

Nein aux supermarchés Bio Compagny qui comme les pissenlits envahissent toutes les rues berlinoises. Je n’ai rien contre les magasins bio mais une fois à l’intérieur et même à l’extérieur, l’odeur de croquettes pour chats qu’il s’en dégage m’insupporte.

Nein à la Birkenstock: Le mocassin d’été allemand qui a encore moins de contenance que la Tongue !

Birkenstock - Photo et site internet de Garance Doré.
Birkenstock – Photo et site internet de Garance Doré.

Nein au FKK (Freikörperkultur soit la culture nudiste allemande). Mes colocataires s’insurgent  timidement devant une nuisette (dédicace à mes amies françaises me rendant visite) mais trouvent bizarre que j’aille au sauna et à la plage en maillot de bain !

Nein aux mots allemands portant à confusion comme das Kopfkissen qui  signifie Oreiller. Kopf = tête et Kissen =  Coussin. Ne pas confondre Kissen  avec le Kiss anglais, car vous risqueriez de ne pas comprendre pourquoi après une opération chirurgicale, médecins et infirmières veulent tous, sans exceptions, vous faire un baiser sur la tête. 

Nein à la ponctualité à tout prix : LE cliché suprême ! Pourtant, je souffre juste d’être LA maudite qu’on attend le ventre creux, quand j’arrive 30 minutes en retard au  traditionnel Frühstück allemand (Breakfast) du dimanche matin. Cool, les amis, c’est le week-end!

Madame la Chancelière, Monsieur le Président, je ne m’habituerai peut-être jamais à tout ça et c’est un mal pour un bien. C’est des clichés diront certains, c’est culturel diront d’autres, c’est une histoire d’amour vous dirais-je. A bon entendeur salut !  

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Commentaires

Mathilde
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et Paf! Ha ha ha, bravo Aurore ! C'est bien enlevé !
.... mais je veux l'article sur ta grand-mère maintenant. Forcément.

aurora
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Ma Grand-mère mérite plus qu'un article, j'hésite encore...!

Limoune
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Ah j'adore lire tes articles. Ton humour me fait sourire et ton style m’émerveille. Non, je ne te jette pas de fleurs. D'ailleurs si tu n'assumes pas ce commentaire, je t'invite à le supprimer, je ne le prendrai pas mal ;)

aurora
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Merci mais bon ... quand même tu exagères ;-)

Stéphane Huët
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Haha ! Les sandales avec les chaussettes. Pour moi, c'est ça LE cliché allemand. Toujours un plaisir de te lire. Keep it up!

serge
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Un de mes amis allemand qui a abandonné la discipline germanique me raconte souvent qu' aller au supermarché est un vrai combat.. car paraît il on n'y accepte pas les sachets plastiques. Chacun doit se ramener avec du carton. Parfois c'est plus facile de vivre dans l'anarchie

Fofana Baba Idriss
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Super ton article. Tu as eu un franc-parler.